Investiture de Donald Trump : Trump 2.0 ou un nouveau départ ?
Lorsque Donald Trump a remporté la victoire le 6 novembre dernier, le monde entier a ressenti un étrange sentiment de déjà-vu. Sa rhétorique électorale rappelait fortement celle de 2016, tout comme la réaction initiale de la Bourse. Cependant, cette euphorie boursière a été de courte durée cette fois-ci, sans prolongement en décembre. Début 2025, Wall Street a également connu un démarrage hésitant. Quels aspects de l’approche de Trump créent ce sentiment de déjà-vu et quels éléments sont différents cette fois-ci ?
Mesures fiscales nationales
Comme souvent chez les républicains, l’agenda national est rempli de mesures fiscalement avantageuses, principalement destinées aux entreprises et à Wall Street, mais aussi, dans une certaine mesure, au citoyen lambda. Les prévisions les plus pessimistes concernant le déficit budgétaire pour les dix prochaines années, en raison de ces mesures, s’élèvent à 7,75 trillions USD supplémentaires à financer. Cependant, nous savons que la réalité est souvent moins dramatique que les prévisions. Ce chiffre doit donc être relativisé, même si cette administration dispose d’une carte blanche pour les deux prochaines années grâce à une majorité absolue à la fois à la Chambre et au Sénat.
Nous devons également mentionner Elon Musk, chargé de réduire considérablement la taille de l’appareil gouvernemental. Pour ce faire, un nouveau département a été créé, à savoir le DOGE (« Department of Government Efficiency »). Initialement, il était question de réaliser deux trillions USD d’économies lors de l’entrée en fonction de Trump en 2017, mais des doutes sur la faisabilité de ce plan ont émergé tout au long de son mandat, même au sein de ses propres rangs. Une analyse plus approfondie des chiffres actuels et des possibilités de ces économies indique que, si elles sont réalisées, l’opération touchera principalement la fonction publique et la sécurité sociale (secteur de la santé et mesures de soutien liées au Covid). Les avantages et subventions accumulés disparaîtront donc, et c’est principalement le citoyen lambda qui en paiera le prix.
Guerre commerciale
Dans la rhétorique autour de la guerre commerciale, peu de choses ont changé. L’administration Biden a largement maintenu les mesures de Trump 1.0 au cours des quatre dernières années ; Trump 2.0 y ajoutera une nouvelle intensité. En plus de la Chine, les pays voisins, à savoir le Mexique et le Canada, sont désormais également dans le viseur. Pour la Chine, le gouvernement souhaite augmenter les tarifs à 50% pour certains secteurs ! Il reste encore à déterminer si cela sera mis en œuvre progressivement – par exemple, avec une augmentation mensuelle de 2% à 5% – ou en une seule fois.
Processus de désinflation et évolution des taux d’intérêt
Il est important de souligner que l’environnement économique actuel, en termes de dynamique de croissance, d’inflation et de taux d’intérêt, diffère de celui du début du premier mandat de Trump en 2017. Aujourd’hui, l’économie américaine reste encore en excellente santé, avec un atterrissage en douceur – évoqué depuis 18 mois – qui ne s’est toujours pas concrétisé. La FED a maîtrisé l’inflation grâce à une politique de taux d’intérêt stricte, mais le processus de désinflation est toujours retardé. De plus, les réductions d’impôts et les mesures protectionnistes supplémentaires risquent de compliquer davantage ce processus. Certains analystes craignent même, dans leur scénario du pire, une deuxième vague d’inflation qui pourrait complètement bouleverser les prévisions futures des taux d’intérêt.
Ce qui diffère également en matière de protectionnisme et de guerre commerciale par rapport à 2016-2017, c’est que celle-ci était largement fondée sur des accusations de manipulation du marché des devises à l’encontre des pays avec lesquels les Etats-Unis ont un important déficit commercial (par exemple, la Chine). Cela a conduit à un affaiblissement significatif du dollar en 2017 (EUR/USD de 1,10 à 1,25). Jusqu’à présent, il n’y a cependant pas de rhétorique autour d’une guerre des devises, ce qui est très remarquable, d’autant plus que le dollar est historiquement élevé et considérablement plus cher qu’en 2017 :
Contexte géopolitique
L’environnement géopolitique et la rhétorique associée sont finalement devenus considérablement plus durs par rapport à 2016. En 2017, l’administration Trump avait initialement posé des difficultés aux pays de l’OTAN et remis en question le fonctionnement de l’organisation. Le message était alors très clair : contribuez à la facture ou l’OTAN devra continuer sans la participation américaine. Il semble que cette menace soit aujourd’hui plus crédible qu’en 2017.
En matière de sécurité stratégique, l’approche de Trump est aujourd’hui différente. En 2019, sa tentative d’acheter le Groenland (et évidemment ses ressources) au Danemark avait suscité des moqueries à travers le monde. Aujourd’hui, ses ambitions sont prises plus au sérieux, d’autant qu’il a même menacé d’annexer le Groenland manu militari. Il en va de même pour le canal de Panama, en raison de l’ingérence de la Chine. Même le paisible voisin du nord, le Canada, craint pour sa souveraineté.
L’Europe se trouve également dans une position délicate en raison de la guerre en Ukraine et de la relation avec Poutine. La position de Trump vis-à-vis de Poutine reste toujours ambigüe. L’implication d’Elon Musk dans la politique internationale, avec son soutien ouvert à des partis extrêmes comme l’AfD en Allemagne (anti-UE et pro-Poutine), complique encore la situation, surtout pour l’Europe.